mercredi 24 février 2016

RDC: Une étude scientifique sur les gays de Kinshasa et de Kisangani




 L’Échangeur de Limete à Kinshasa

 Communauté ignorée il y a quelques années, les homosexuels congolais attirent aujourd’hui l’attention des journalistes,  des photographes et des chercheurs  étrangers.  Ce fait n’a pas laissé indifférent Thomas Hendriks,  chercheur de 33 ans et Professeur Assistant à l’Université de Louvain en Belgique. 


Une vue de la ville de Kisangani avec la Mairie et le fleuve

Depuis 3 ans déjà, ce jeune anthropologue mène une étude sur l’homosexualité dans deux villes congolaises, à savoir : Kinshasa et Kisangani. Selon lui, il a été très étonné par ce qu’il a découvert car certains membres de la communauté gay et même l’ensemble de la population LGBTI de la capitale, par exemple, osent quand même s’afficher malgré une homophobie qui peut être virulente.  Le chercheur a noté  que les minorités sexuelles en général et les homosexuels en particulier ne sont pas toujours victimes des réactions négatives dans les lieux d’ambiances comme les bars, les boites de nuit et les autres espaces de détente.  Ce cas est surtout visible à Kinshasa qu’à Kisangani car la capitale est plus grande et dispose de plus d’endroits pour se divertir.  Toutefois,  l’anthropologue tient à préciser que si les homosexuels sont tolérés sur les lieux d’ambiance, cela n’est pas le cas au sein de la famille.

Kinshasa, les boites de nuit sont pour la plupart gay friendly



En effet, comme nous l’a fait remarquer Thomas Hendriks, la plupart des homosexuels ne sont pas acceptés dans leur famille au Congo.  Pour éviter le rejet de la part de leurs proches, beaucoup d’entre eux vivent leur orientation sexuelle en cachette. La pression faite par la famille amène d’ailleurs certains homosexuels à se marier pour être en conformité avec la société congolaise. Toutefois, le chercheur Belge a relevé le fait que ceux qui prennent une femme pour épouse ne le font pas nécessairement parce qu’il y a une pression venant de leurs parents. Certains, a-t-il ajouté, expriment eux même le désir de se marier et d’avoir des enfants. En tant qu’anthropologue, le Professeur Assistant voit en cela un souci de vouloir se conformer  aux traditions.  

Le cas le plus étonnant que le chercheur a  épinglé durant cette étude est le fait que  beaucoup de personnes que ça soit à Kinshasa ou à Kisangani ne se reconnaissent pas comme homosexuel ni même comme bisexuel bien qu’ils ont des rapports sexuels avec les partenaires de sexe identique.  Pour Thomas, ce comportement est une forme de non culpabilisation par rapport à l’acte sexuel posé. Cela l’a conduit à dire que l’homosexualité en RDC peut être perçue plus comme une pratique qu’une orientation sexuelle. 

" Que ça soit à Kinshasa ou à Kisangani, beaucoup de personnes ne se reconnaissent pas comme homosexuel ni même comme bisexuel bien qu'ils ont des rapports sexuels avec des partenaires de sexe identique"

 "L'homosexualité peut être perçue plus comme une pratique qu’une orientation sexuelle "

A travers son étude qui n’est certes pas exhaustive mais revêt une importance capitale, monsieur Hendriks nous permet d’en savoir un peu plus sur une communauté qui a longtemps vécu dans l’ombre. Le chercheur a commencé son travail par la capitale Kinshasa où il n’a pas eu beaucoup de difficulté pour  rencontrer les homosexuels via les différentes associations qui les regroupent à travers la ville.  L’idée de faire une étude sur l’homosexualité en RDC est venue à Thomas  suite au constat qu’il n’y avait pratiquement aucun travail scientifique sur ce sujet pourtant d’actualité depuis quelques temps. Le chercheur a,   ainsi, décidé de faire un projet de 4 ans montrant l’intérêt d’une telle recherche.  L’idée tombait au bon moment d’autant plus que l’Afrique  faisait, notamment, la une de l’actualité suite à une vague de lois homophobes qui étaient en voie d’être votées dans certains pays.  D’ailleurs, la RDC n’était pas épargnée car entre 2010 et 2013, deux projets de loi ont été déposées à l’Assemblée  Nationale.  Ces actes juridiques visant à interdire l’homosexualité sur l’ensemble du territoire congolais avait poussé la presse internationale à s’intéresser  aux minorités sexuelles vivant dans ce vaste pays. L’organisation des personnes LGBTI en différentes associations en vue de s’opposer  aux projets de loi anti gay a aussi contribué à pousser les médias externes à parler d’eux.  Avant cela, les rares articles consacrés aux gays et aux autres minorités sexuelles  dans la presse congolaise ont toujours été relatés sous un aspect négatif et insolite qui ne peut que favoriser l’hostilité envers eux.

Thomas Kendriks va poursuivre ses recherches pendant encore une année sur la communauté homosexuelle congolaise. Débutée en 2013, cette étude pendra fin en 2017 et sera sans nul doute la première étude du genre à être réalisée sur la RDC.



Article rédigé par Justice Walu


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